La voix joue un rôle essentiel dans la communication. À l’école, un trouble vocal peut avoir un retentissement sur les relations de l’élève avec ses camarades et impacter certains apprentissages en expression orale, chant, activités théâtrales… Il s’agit donc pour les enseignants d’identifier les besoins éducatifs particuliers (BEP) des jeunes concernés et d’y répondre, d’autant que la maîtrise de l’oral constitue un outil important de réduction des inégalités.

 

BEP (Besoins éducatifs particuliers)

Les répercussions des maladies sur la scolarisation peuvent entraîner des besoins éducatifs particuliers (BEP). Pour l'école, il s'agit en premier lieu de faciliter l'accès aux apprentissages pour les élèves, qu'ils soient, malades ou non, en mettant en œuvre des pratiques bénéfiques à tous (Voir les fiches de la rubrique jaune  « Rendre l'école accessible »). Mais pour certains jeunes malades, des aménagements spécifiques doivent être réalisés, concernant la vie scolaire et/ou les temps de classe. Il s’agit de leur permettre d'apprendre au mieux de leurs capacités, dans un contexte favorable et grâce à des adaptations pédagogiques individuelles ou au sein de petits groupes.

 

La voix des enfants et des adolescents

Du cri à la voix : le tout-petit émet des cris.et c’est généralement vers 1 an que les premiers mots sont acquis, que les caractéristiques de la voix se stabilisent et que la voix d’un enfant permet de le reconnaître sans le voir. L’enfant devient capable d’oraliser les émotions auparavant exprimées par des mouvements de tout le corps et des cris. À l’entrée en maternelle, la voix peut devenir un outil d’affirmation de soi au sein de l’école. Souvent ceux qui crient le plus fort deviennent le leader de leur groupe. Vers 6 ans, l’enfant peut généralement imiter la voix des adultes et celle d’autres enfants. Il s’approprie les règles de vie en collectivité et sa voix est ainsi contenue selon les les moments et les activités.

La voix évolue. Les filles ont une période de pré-mue vers 7-8 ans. La mue apparaît entre 10 et 11 ans et les changements vocaux se déroulent pendant 6 ans environ. Pour la majorité des garçons, le début de la mue se situe entre 12 ans et demi et 14 ans et demi et elle dure en moyenne 1 an et demi (avec des extrêmes entre 6 mois et 4 ans). Il arrive que certains adolescents supportent mal leur mue vocale. Certains disent ne pas aimer leur nouvelle voix grave. Mais c’est surtout leur instabilité vocale (incursions transitoires dans le registre grave, sur une tonalité globale aiguë) qui les gêne le plus. Il est souvent utile de leur expliquer que malgré la mue, la voix d’enfant est toujours accessible sous la forme de la voix de tête ou de fausset (timbre de voix très aigu, suite à la contraction forcée des cordes vocales).

Les émotions et les états affectifs que nous traversons modulent en permanence la voix : sa tonalité, son timbre, son intensité. La gaieté, la colère, la surprise peuvent avoir un effet stimulant sur la voix, la peine, la douleur, l’anxiété un effet dépressif.

La voix est un élément essentiel dans les relations avec les autres. En effet, les émotions se manifestent de façon inconsciente sur le visage, dans la voix et à travers les comportements. Non seulement la voix nous permet d’interpréter chez un interlocuteur la nature d’une émotion : joie, colère, tristesse, peur, dégoût… Mais elle renseigne aussi pour chacune d’entre elle sur son intensité et son degré de contrôle. Par exemple, pour la colère, la voix ne sera pas la même, s’il s’agit d’une réaction immédiate à une situation irritante (émotion brute) ou s’il s’agit d’un ressentiment ancien à l’encontre de l’interlocuteur (attitude contrôlée).

La voix est influencée par la culture. Il existe une diversité de voix, comme il existe une diversité de cultures. Par exemple, en Inde, la tristesse s’exprime plutôt sur un registre aigu et la gaieté sur un registre grave. C’est le contraire en Europe. Il existe des cultures où la voix de fausset est très utilisée chez l’homme, ce qui n’est pas le cas dans d’autres.

 

Quelques causes de troubles de la voix

Les troubles de la voix ont des origines très diverses. Ils peuvent être en lien avec :
- une atteinte des cordes vocales: infection ou allergie au niveau du larynx (Le larynx est un ensemble de cartilages et de muscles, situé entre la gorge et la trachée. Il contient les cordes vocales et joue donc un rôle important dans la phonation, c’est à dire dans la production de la voix et l’articulation de la parole).
- une atteinte neurologique : au niveau des nerfs qui innervent le larynx ou de leur commande cérébrale.
- un malmenage vocal : c’est un forçage de la voix (suite à des cris répétés; par exemple en récréation, en regardant un match de foot…). En cas de malmenage vocal, il se produit des contractions musculaires inappropriées au niveau du larynx. Cela produit une altération de la voix ou une aphonie (impossibilité de parler). Le jeune en cherchant à lutter et en forçant sa voix, accroît les contractions musculaires et cela peut aboutir à des lésions des cordes vocales. Parfois l’enfant force sa voix car il a des lésions congénitales (c’est-à-dire présentes à la naissance) qui l’obligent à forcer sa voix en réaction à la perturbation qu’elles créent.
- un choc affectif peut parfois quelquefois être à l’origine d’une altération de la voix.

 

Différencier altération de la voix et trouble du langage

On appelle dysphonie une altération de la voix. Quand il y a une atteinte d’origine neurologique, la dysphonie peut être associée à une difficulté à programmer les mouvements permettant la production de la parole et/ou à une difficulté à articuler les sons. Tous ces troubles qui concernent la voix et la parole sont à différencier des troubles qui touchent le langage (dysphasies). En effet, le langage ne se situe pas sur le même plan. C’est une activité cognitive qui permet d’élaborer ou de comprendre les messages.

À l’école, l’enseignement de l’oral vise à développer le langage. Il induit des situations d’apprentissage qui impliquent l’ensemble de la personne, d’où un sentiment d’insécurité possible pour l’élève, d’autant plus s’il souffre d’une altération de la voix. (Voir Les enjeux de l’enseignement de l’oral)

 

Retentissement des troubles de la voix à l’école

Les altérations de la voix peuvent avoir un impact :
- sur la communication et donc sur la socialisation de l’élève
- sur certaines situations d’apprentissage : expression orale, chant, activités théâtrales, notamment.
Il s’agit donc pour les enseignants d’identifier les besoins éducatifs particuliers (BEP) des jeunes concernés et d’y répondre.

 

Communication et socialisation

La voix est une composante de l’identité et son altération peut toucher la qualité de vie de l’élève en influant sur ses relations avec les autres et sa confiance en lui.

À la maison, les parents apprécient parfois la voix de leur enfant, éraillée, telle qu’elle est et le jeune peut être valorisé par sa voix parce qu’elle est singulière et aussi du fait qu’elle le rapproche du monde adulte (voix rauque, ressemblant à une voix d’adulte). Si à l’école, au contraire, l’élève subit des moqueries de la part de ses camarades, cela peut contribuer à réduire sa confiance en lui-même.
Des enfants de 5-7 ans s’expriment en disant que « leur voix ne marche pas bien », que les adultes leur demandent de parler moins fort. Les plus âgés (8-10 ans) et les adolescents se plaignent également d’une attention trop grande portée à leur trouble vocal par leur entourage et certains limitent leur participation sociale concernant des événements pourtant importants à leurs yeux. Beaucoup des jeunes concernés rapportent des sentiments de colère, de tristesse, de découragement, qui expliquent leur éventuelle mise en retrait et les incidences possibles sur leur socialisation.

Les élèves avec une altération de la voix peuvent donc avoir différents BEP auxquels il est nécessaire de répondre :
- besoin d’un environnement sonore calme pour éviter le forçage de la voix. On peut rappeler à l’ensemble des élèves que la voix est un outil de communication qui n’est pas infatigable et qu’après un effort vocal important (crier en récréation, supporter son équipe au gymnase, s’adresser à toute la tablée au réfectoire…), la voix  a besoin de se reposer pour récupérer comme un sportif après une compétition. On peut demander aux élèves de lister tous les moments où ils sollicitent leur voix de façon intense.
- besoins accrus d’appartenance au groupe de pairs, de reconnaissance et d’estime de soi, de réalisation de soi. La pédagogie de projet et le travail en groupe, les activités d’expression (écrite et artistique, notamment), des temps de régulation (ateliers philosophiques, temps dédiés à la vie de la classe…) sont des pistes possibles pour répondre à leurs besoins.

 

Situations d’apprentissage

Paradoxalement les situations d’apprentissage qui mettent ces élèves en difficulté peuvent aussi contribuer à l’amélioration de leur voix, à condition de veiller à ce qu’il n’y ait pas de forçage vocal et à condition qu’un climat bienveillant puisse être établi au sein de la classe.

Voici quelques exemples de situations d’apprentissage courantes où la voix joue un rôle important et qui peuvent aider des élèves ayant un trouble vocal. Elles doivent être proposées pour répondre à des objectifs précis en lien avec les programmes et le socle commun de connaissances, de compétences et de culture et si possible s’inscrire dans un projet pédagogique. Elles doivent clairement se différencier de séances de rééducation.

- Jeux de souffle
Soupirer, gonfler un ballon, souffler sur une plume en lui faisant faire un parcours…

- Comptines, chants
Faire travailler ces élèves avec leurs pairs valides au sein d’une chorale. Les placer devant pour être sûr qu’ils voient bien le chef de choeur. Dans cette situation, certains, selon leurs moyens et leur motivation chanteront d'emblée, d’autres commenceront simplement par écouter ou ne chanter que de brefs passages, quelques mots. La situation peut évoluer au cours du temps, du fait qu’ils se sentent portés par le groupe dans un climat bienveillant.

De façon complémentaire, faire travailler ces élèves en difficulté en petit groupe, pour répéter les paroles, certains mots plus difficiles à mémoriser ou à prononcer, leur expliquer de façon plus approfondie le sens du texte. Leur proposer d’apprendre le texte de la chanson comme un poème à mémoriser. Accompagner la chanson par des gestes. Déterminer avec eux par une réflexion métacognitive (qui peut être aussi bénéfique à l’ensemble de la classe), quelles sont pour chacun les meilleures stratégies d’apprentissage.

Pour limiter la fatigue et des sentiments de frustration liés à des sensations d’échec, alterner les moments de chant avec des jeux rythmiques, avec des temps de pratique instrumentale, avec des temps d’écoute musicale (CD de musique, de chant, enregistrements des élèves…), voire pour des élèves très fatigables avec des temps de pause, de repos.

- Activités d’expression orale pouvant s’inscrire dans un projet théâtre par exemple
Reconnaître et imiter des sons (voix humaine, bruits de l’environnement, cris d’animaux
Faire varier l’intensité de sa voix : chuchoter, parler plus ou moins fort (sans forcer)
Jeux de virelangue (Les chaussettes de l’archiduchesse sont-elles sèches...)
Dire ou lire un texte lentement, rapidement, très lentement, très rapidement…
Dire ou lire un texte dans différents registres (graves, aigus)
Travailler l’intonation sur des phrases déclaratives, exclamatives, interrogatives et en fonction de la ponctuation : point, virgule
Exprimer une intention : dire une phrase ou un texte selon différents sentiments ou émotions
Savoir ponctuer son discours de temps de silence

 

Récapitulatif des points principaux

- La voix contribue à l’identité et représente un élément essentiel dans la relation avec les autres.
- Une altération de la voix peut provoquer certains besoins éducatifs particuliers.
- Répondre à ces besoins nécessite d’envisager à la fois la question de la socialisation et celle des apprentissages des élèves concernés.

L’élaboration de cette fiche s’est appuyée sur les éléments bibliographiques suivants :

- Chevaillier, G. La voix de l'enfant et ses troubles fonctionnels. Enfances & Psy, 58(1), 2013, p. 15-28.

-  Lacheret, A. Le corps en voix ou l’expression prosodique des émotions. Évolutions psychomotrices, 2011, 23(90), p. 25-37. <halshs-00641074>
Consulter le document

- Cornut, G. La voix. PUF, 2009. (Que sais-je ?).

 

Pour avoir des pistes pédagogiques plus détaillées, voir la rubrique jaune.

Pour travailler en partenariat, voir la rubrique rouge.

Pour connaître le point de vue des personnes concernées, voir la rubrique verte : témoignages ou associations.

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