Qu’est ce que la mucopolysaccharidose ?

Les mucopolysaccharidoses (ou MPS) sont un groupe de maladies métaboliques, dites « de surcharge  lysosomale ». Ce sont des maladies génétiques rares, qui entraînent de multiples symptômes (orthopédiques, ORL, respiratoires, cardiaques, ophtalmologiques, neurologiques…) et dont le spectre de gravité et les organes touchés sont variables d’un enfant à l’autre, et selon le type de MPS. On connait actuellement 7 types de MPS, et cette fiche s’intéressera plus particulièrement aux MPS dont les atteintes permettent en général une scolarité en milieu ordinaire, à savoir :
-       MPS de type I, ou maladie de Hurler ou Hurler-Scheie
-       MPS de type II, ou maladie de Hunter
-       MPS de type III ou maladie de San Filippo
-       MPS  de type IV ou maladie de Morquio
-       MPS de type VI et VII ou respectivement maladie de Maroteaux Lamy et Sly 

 

Pourquoi ? 

Les MPS sont dues à une mutation génétique, avec une transmission liée à l’X dans les MPSII (présente uniquement chez les garçons et soit transmise par la mère, soit d’apparition « de novo » chez un enfant de parents non porteurs), et dans tous les autres types de MPS, une transmission autosomique récessive, pouvant se voir chez les filles et les garçons (chaque parent transmet alors une mutation et la combinaison de deux mutations a pour conséquence la maladie). Cette mutation est responsable du mauvais fonctionnement d’enzymes qui assurent normalement la dégradation de certains constituants de la membrane et du tissu de soutien cellulaires : les mucopolysaccharides, appelés aussi glycosaminoglycanes. Ces réactions de dégradation se font dans un compartiment présent dans toutes les cellules de l’organisme : le lysosome. L’absence de dégradation de ces composants va entraîner leur accumulation progressive dans le lysosome et compromettre le bon fonctionnement cellulaire, ce qui explique l’appellation « maladie de surcharge lysosomale », et le fait que ces patients présentent des atteintes multiples de plusieurs organes. Les enfants ne sont habituellement pas malades à la naissance, les symptômes apparaissent progressivement, au fur et à mesure que leurs cellules accumulent ces « déchets » non éliminés. Le degré de gravité et l’âge de survenue des premiers symptômes de la maladie vont dépendre de l’activité enzymatique résiduelle (formes sévères et précoces souvent en rapport avec une activité enzymatique nulle). 

 

Quels symptômes et quelles conséquences ? 

Les MPS sont des maladies touchant plusieurs organes et d’évolution progressive.

Certains symptômes sont spécifiques d’un type de MPS mais la plupart des symptômes sont communs à tous les types de MPS, avec des degrés variables :
-       Un faciès particulier, commun à tous les types de MPS, avec des traits « épais », qui s’accentuent avec l'âge. Il existe également souvent une macrocrânie (tête « volumineuse »).
-       Une atteinte osseuse : déformations osseuses au niveau des membres (genoux « en X » ou genu valgum, raideur des coudes), de la colonne vertébrale (enfant « bossu » ou cyphose, scoliose), du thorax, et des extrémités (mains en griffe). Ces déformations vont entraîner une raideur progressive des articulations pouvant les gêner dans les déplacements, les mouvements des membres (patients souvent incapables de lever les bras au dessus de la tête), et l’écriture. Elles peuvent également entraîner des douleurs, une fatigabilité à l’effort, et des conséquences neurologiques (cf ci dessous). Enfin, elles seront responsables d’une petite taille et d’un retard de croissance.
-      Une atteinte ORL : surcharge des tissus au niveau du larynx et du pharynx responsable d’infections ORL (angines, pharyngites, otites) fréquentes et d’un encombrement chronique avec parfois une respiration bruyante. Dans les formes sévères, cela peut se compliquer d’un Syndrome d’Apnées du Sommeil (difficultés à respirer la nuit, pouvant nécessiter une ventilation non invasive pour garder les voies aériennes ouvertes).  De plus, la surcharge au niveau des oreilles et les otites à répétition peuvent entraîner une surdité modérée.
-       Une atteinte pulmonaire : infections bronchiques à répétition avec parfois un retentissement sur la capacité à respirer (enfants plus facilement essoufflés et fatigables, notamment à l’effort).
-       Atteinte ophtalmologique : baisse d’acuité visuelle pouvant être en rapport avec différents mécanismes : voile sur la cornée (voile blanchâtre sur l’œil), glaucome, atteinte de la rétine, myopie, astigmatisme, hypermétropie, etc.
-       Atteinte neurologique : on note 2 types de symptômes neurologiques chez les patients MPS : 

o   Une atteinte cognitive avec retard des acquisitions, déficience intellectuelle, troubles du comportement (agitation, hyperactivité, traits autistiques). Cette atteinte n’est pas présente dans tous les types de MPS et peut être très variable d’un patient à l’autre.
o   Des symptômes en rapport avec l’atteinte osseuse :

§  Compression de nerfs au niveau des membres provoquant un syndrome du canal carpien (douleurs à type de décharge électrique, fourmis et parfois perte de force au niveau des doigts)
§  Compression progressive de la moelle épinière au niveau de la colonne vertébrale provoquant des difficultés à la marche et une perte de force musculaire des membres. 

-       Atteinte abdominale : hépato splénomégalie (foie et rate augmentés de taille entraînant un abdomen volumineux), régressant sous traitement. Les patients peuvent aussi présenter des hernies (saillie des intestins sous la peau du ventre, le plus souvent au niveau de l’ombilic ou du pli de l’aine), par fragilité du tissu conjonctif. Hormis le côté esthétique, ces atteintes n’ont pas de conséquences.
-       Atteinte cardiaque : anomalies au niveau des valves cardiaques ou hypertrophie du muscle du cœur, mais la plupart du temps ces anomalies sont modérées, asymptomatiques, et ne nécessitent pas de traitement.
-       Atteinte dentaire : difficultés à ouvrir la bouche (raideur de la mâchoire), retard d’éruption dentaire, anomalies de l’émail…

À noter que certains symptômes seront spécifiques ou plus sévères selon le type de MPS :  

MPS de type I : 

Il existe classiquement 3 formes de cette maladie selon la gravité et la précocité des symptômes. La forme de Hurler est la plus sévère avec une atteinte précoce dans les deux premières années de vie, touchant le cerveau (atteinte cognitive) et tous les organes précédemment cités. La forme de Scheie est la forme la plus modérée avec un début plus tardif (après 5 ans), l’absence d’atteinte intellectuelle, et une atteinte des autres organes plusmodérée, prédominante au niveau osseux. La forme Hurler-Scheie est une forme intermédiaire, où le degré de gravité des différentes atteintes peut être très variable d’un patient à un autre.

MPS de type II (maladie de Hunter) :

Il existe également 2 types de MPSII :

- Le type IIA : l’atteinte neurologique est sévère et au premier plan, avec en particulier des troubles du comportement majeurs. Les patients se dégradent rapidement sur le plan cognitif entre 6 et 10 ans, et peuvent également présenter une épilepsie.
- Le type IIB : sans atteinte intellectuelle ou alors modérée et non évolutive.
Concernant les atteintes des autres organes, ce type de MPS est très proche du type I. 

MPS de type III (maladie de San Filippo) :

Ces patients présentent principalement des symptômes neurologiques avec déficience intellectuelle, troubles du comportement sévères, épilepsie et troubles du sommeil, évoluant vers une dégradation neurologique progressive rapide dans les 10-20 premières années de vie. Les atteintes des autres organes sont généralement peu sévères.   

MPS de type IV (maladie de Morquio) :

Ces patients n’ont pas d’atteinte cognitive et ne présentent pas de régression dans leurs apprentissages. Leur intelligence est normale mais ils sont surtout gênés par une atteinte osseuse très marquée avec des déformations majeures (membres, thorax et colonne vertébrale), entraînant une très petite taille, et la nécessité rapide de se déplacer en fauteuil roulant par impossibilité de marcher. En revanche, contrairement aux autres MPS qui développent des mains et des pieds raides « en griffe », ces patients ont une hyperlaxité majeure des extrémités, qui peut entraîner une baisse de la force musculaire, des difficultés de préhension et à la marche et donc des difficultés d’écriture. Ces atteintes orthopédiques majeures rendent ces patients également fragiles au niveau de la colonne vertébrale, et à risque de compression médullaire aigüe en cas de mouvements trop brusques de la nuque.

MPS de type VI (maladie de Maroteaux Lamy)

Dans cette forme, il n’y a pas d’atteinte cognitive mais les patients peuvent présenter toutes les atteintes d’autres organes, comme dans les MPSI. 

 

Quelques chiffres 

Les MPS sont des maladies rares, leur fréquence cumulée est estimée entre 1/25 000 à 1/30 000 naissances. La forme la plus fréquente est la MPS de type I avec une prévalence d’environ 1/100 000 naissances. 

 

Traitement

À ce jour, il n’existe pas de traitement curatif de cette maladie génétique. Cependant, depuis le début des années 2000, une enzymothérapie substitutive est disponible dans certains types de MPS (type I, II, IV et VI), sous forme de perfusions hebdomadaires, qui vont apporter l’enzyme déficiente dans certains des tissus atteints. Ce traitement va permettre une amélioration de la majorité des symptômes et de la qualité de vie, mais reste malheureusement inefficace sur les atteintes neurologiques et osseuses notamment. 

Les patients atteints de MPSI de forme sévère peuvent également bénéficier d’une greffe de moelle osseuse (apport de l’activité enzymatique via les cellules sanguines du donneur). Cette option, bien que plus risquée, aura une meilleure efficacité que l’enzymothérapie. Elle aura également pour effet de ralentir nettement la progression de la maladie, sans pour autant la guérir ou faire disparaître complètement les symptômes. Une greffe de moelle n’est en général envisagée que si le diagnostic est fait très précocement (avant 2 ans) car plus elle est réalisée tôt, meilleurs sont les résultats. Ces patients seront donc au moins transitoirement sous traitement immuno-suppresseur, avec les précautions que cela implique (cf. fiche Greffe de moelle osseuse). 

Enfin, au-delà du traitement curatif spécifique, ces enfants bénéficient d’une prise en charge multidisciplinaire symptomatique, adaptée à chaque atteinte d’organes :
-       Atteintes osseuses : 

o   Attelles, corset, cannes, déambulateur ou éventuellement fauteuil roulant,
o   Kinésithérapie motrice régulière, ergothérapie,
o   Chirurgie pour traiter les déformations trop importantes (colonne vertébrale, membres inférieurs…).

-       Atteintes ORL : 

o   Antibiotiques si otites ou angines répétées
o   Mise en place de « Yoyos » dans les oreilles pour éviter la récidive d’otites
o   Appareillage auditif si surdité
o   Chirurgie ORL (retrait des amygdales et/ou des végétations) pour libérer la respiration et limiter les infections à répétition
o   Ventilation non invasive nocturne si syndrome d’apnées du sommeil 

-       Atteintes ophtalmologiques : 

o   Collyre voire chirurgie si glaucome
o   Lunettes si troubles de la réfraction
o   Greffe de cornée si opacités cornéennes trop importantes 

-       Atteintes neurologiques : 

o   Prise en charge multidisciplinaire (psychologue, psychomotricienne, éducateur-trice, orthophoniste …) des troubles des apprentissages et du comportement
o   Éventuellement traitement médicamenteux des troubles du comportement et de l’hyperactivité
o   Eventuellement traitement médicamenteux des troubles du sommeil
o   Chirurgie orthopédique de la colonne vertébrale, ou du canal carpien si compression médullaire ou nerveuse respectivement. 

-       Atteinte abdominale : chirurgie pour traiter d’éventuelles hernies
-       Atteinte pulmonaire : traitements identiques à ceux de l’asthme pour favoriser la respiration et limiter les infections respiratoires à répétition
-       Atteintes dentaires : chirurgie ou traitements dentaires à répétition.
-       Traitements antalgiques : pour les douleurs pouvant être dues aux déformations articulaires, aux atteintes dentaires, mais aussi aux compressions nerveuses. 

 

Conséquences sur la vie scolaire 

Les multiples atteintes de ces patients font que leur scolarité doit être adaptée, et ce sur plusieurs plans. 

Le degré de l’atteinte cognitive va conditionner la scolarisation en milieu ordinaire, les aménagements nécessaires à l’intégration de l’enfant dans la classe (AVS/AESH, temps partiel, etc.) et l’adaptation du programme et des outils éducatifs à ses capacités. Parfois, la poursuite de la scolarité devra se faire en IME (Institut Medico Educatif) si l’atteinte est trop sévère. 

S’il n’y a pas de déficit cognitif, il faudra également mettre en place des aménagements pour s’adapter aux autres handicaps (moteurs et sensoriels notamment). Souvent, une fatigabilité importante associée à la prise en charge thérapeutique conséquente (traitement hebdomadaire, suivi médical régulier, multiples séances de rééducation, etc.) vont nécessiter un allègement de l’emploi du temps, des dispenses de certaines activités,  voire l’organisation d’une partie de la scolarité à domicile (Sapad, Sessad, etc.). 

Il faudra aussi tenir compte de ces particularités pour adapter les conditions d’évaluation de ces enfants.  

Peu de jeunes atteints de MPS sont scolarisés dans les établissements ordinaires (15 à 20 %) et tous bénéficient de mesures d'aménagements et d'adaptations décrites dans un PPS (Projet personnalisé de scolarité), mises en œuvre lors des réunions d'équipes de suivi de scolarisation et actées par la MDPH. 

 

Quand faire attention ? 

Les situations nécessitant une intervention médicale en urgence sont quasi inexistantes, la maladie étant d’évolution lentement progressive. 

Il faudra cependant être attentif à plusieurs situations :
-       Savoir accepter la fatigabilité de l’élève, surtout en fin de journée, et ne pas donner d’objectifs impossibles ou trop difficiles à réaliser.
-       Limiter les sports violents ou avec sauts répétés (patients fragiles au niveau cervical). Eviter les roulades, trempoline, et tout mouvement brusque de flexion/extension du cou
-       Savoir percevoir les signes évocateurs d’une potentielle évolution de la maladie ou d’un mauvais équilibre du traitement, et en avertir systématiquement les parents en cas de doute :  

o   Une baisse de l’attention ou des résultats scolaires peut traduire une perte d’audition. De même, des endormissements en classe peuvent être évocateurs d’apnées du sommeil.
o   L’expression d’éventuelles douleurs, devenant invalidantes ou inhabituelles : articulaires, dentaires, oculaires, neurologiques (à type de décharges électriques).
o   Une majoration des troubles du comportement peut parfois aboutir à la sortie du milieu scolaire ordinaire.
o   Une perte de force au niveau des mains ou des jambes avec parfois des chutes à répétition peuvent être des signes de compression de nerfs ou de la moelle épinière.
o   Des troubles sphinctériens (mictions impérieuses, pipi /caca dans la culotte) peuvent être aussi des signes de compression de la moelle épinière.

-       Acceptation de la différence physique et du handicap par l’élève et le reste de la classe. Il faudra être vigilant aux signes d’exclusion de l’élève, de renfermement sur lui même, de baisse des résultats scolaires, de baisse de moral, etc.

 

Comment améliorer la vie scolaire des enfants malades ?

Agir sur les contraintes motrices : 

-       Lors des déplacements dans la classe et à l’extérieur : s’adapter aux difficultés de l’élève, aménager les espaces (salle de classe, couloirs, cour de récréation, etc.) pour permettre à l’élève d’utiliser ses aides (fauteuil roulant, attelles, etc.), lui prévoir une place adaptée dans la classe, plutôt proche du tableau (en cas d’atteinte visuelle ou auditive), facile d’accès avec éventuellement une table réglable. L’accessibilité à toutes les installations doit être facilitée et réfléchie, que ce soit pendant le temps scolaire ou extra scolaire (aménagements potentiels à prévoir pour la cantine notamment).
-       Il sera judicieux de limiter les efforts physiques chez ces patients, pour éviter d’accentuer leur fatigabilité et le retentissement de leur atteinte articulaire (ascenseur si salle de classe à l’étage indispensable, dispense ou limitation de l’EPS avec objectifs adaptés à leurs capacités, etc.)
-       Adapter les outils et les supports pédagogiques : utilisation de l'informatique, aides humaines, prise en compte de la fatigabilité et de la lenteur notamment d’écriture. 

Être attentif aux difficultés d’apprentissage et aux troubles du comportement :

-       Optimiser la méthodologie, s'assurer de la bonne compréhension des consignes, mettre en place un tutorat au besoin, s’appuyer sur les aidants (AVS/AESH), voire proposer une ré-orientation en classe spécialisée (CLIS, SEGPA) ou en IME si les difficultés sont trop importantes.
-       Instaurer un environnement sécurisant, le plus stable et le plus ritualisé possible pour limiter les troubles du comportement. 

Adapter les évaluations : temps majoré ou diminution du nombre d'exercices, limiter la quantité d'écrit, ne pas pénaliser le manque de participation à l'oral, le soin dans les travaux écrits, les erreurs (orthographe, grammaticale, d'usage).

 

L’avenir 

La prise en charge des patients atteints de MPS ne permet pas encore à l’heure actuelle d’en guérir et cette maladie reste malheureusement évolutive malgré les traitements, mais de nombreux essais thérapeutiques à travers le monde sont en cours pour tester de nouveaux médicaments, de nouveaux modes de libération d’enzymothérapie pour la rendre plus efficace, mais également des techniques très prometteuses de « thérapie génique », sortes de processus de réparation de l’ADN muté. 

Les patients atteints de forme sévère de MPS ont une espérance de vie limitée et peuvent parfois ne pas atteindre l’âge adulte mais pour certaines formes plus modérées ou ayant été greffées précocement (MPSI type Scheie, certaines formes de MPSIV ou VI), les patients atteignent l’âge adulte sans atteinte cognitive et peuvent donc avoir accès à une vie professionnelle et une autonomie financière. Ils auront évidemment des postes aménagés vu leur handicap moteur, et leur projet professionnel sera donc à réfléchir au plus tôt pour qu’il reste en adéquation avec les aspirations de l’élève et ses capacités physiques. 

Pour avoir des pistes pédagogiques plus détaillées, voir la rubrique jaune.

Pour travailler en partenariat, voir la rubrique rouge.

Pour connaître le point de vue des personnes concernées, voir la rubrique verte : témoignages ou associations.

Pour voir d'autres documents complémentaires, cliquer sur les liens ci-dessous.

 

Mise à jour le 28.10.2020


 

 

Enquête et partage